Cette première image de l’Inde restera gravée dans ma mémoire jusqu’à ma mort si Alzeimher ne me frappe pas avant ! Vu du ciel, il y a cet aéroport de Mumbai, immense et ce nombre incalculable d’appareils bronzant sur le tarmac. Mais il y a surtout, les slums qui encerclent Chhatrapati Shivaji de leur taules tordues faisant office de toits et de murs, de leurs draps bleus ou blancs fânés par le soleil, de cette horde de plastiques morts qui jonchent le sol terreux comme après une bataille perdue ou remportée peu importe.
Il y a aussi les dédales du Old Delhi. Ce Labyrinthe où le Minotaure serait vénéré et non pourchassé. Cet endroit où l’on a parfois la sensation d’être piégé dans une toile d’arignée mal tissée, où volent les balles en cuir de cricket dans les rues étroites et engorgées, où sourient les maigres enfants qui roulent sur leurs vélos aux roues voilées…
Il y a l’apaisante Pushkar, ce brin d’oxygène après l’étouffante Jaipur, la ville Rose. Pushkar aux rues sans voiture et à son lac dans lequel se reflète paisiblement une lune aussi blanche que ronde. Et tandis que les Chameliers retournent dans leur désert, avec leur imposante coiffe lumineuse, les sādhus, eux, laissent s’échapper de leur bouche, un épais nuage de fumée grise.
Puskar Jaipur
Il y a Udaipur, la blanche romantique, qui a pour coeur un immense lac et pour artères des canaux à l’eau pas très claire. Udaipur l’artisante, aux veines trop étroites pour que circulent les globules motorisés, où vivent les peintres, les bijoutiers, les fabricants de jouets et tout un régiment de métiers oubliés.
Il y a Jodhpur, la militaire, dominée par son fort majestueux et impressionnant. Jodhpur, la bleue, avec ses murs couleurs mer, perdue au milieu du désert, qui lézarde sous un fidèle soleil.
Il y a Agra, la paradoxale. Celle qui abrite en elle, le plus merveilleux trésor sur Terre, ce Taj Mahal qui transforme les superlatifs en euphémismes. Celle qui baigne dans un océan de détritus et de crasse où filent les bancs de rats, celle qui fait suffoquer et qui vous oblige à d’innombrables apnées.
Agra
Il y a Calcutta, la belle intellectuelle Victorienne, où l’on croise dans les parcs, les amoureux aux doigts entremêlés, les musiciens aux doigts enchantés et les mendiants aux doigts recourbés.
Et puis… il y a Varanasi, la surnaturelle. Celle où les gens attendent en souriant celle que l’on évite en tremblant. Cette ville de la mort qui respire la vie, peuplée par les éphémères mortels qui regardent les buchers éternels. Ville où se marient les flammes crématoires et les flots expiatoires. Citée où la mort est une invitée que l’on enlace, que l’on embrasse, avec laquelle on veut s’offrir une ultime danse, une dernière étreinte avant de balancer sa vie comme une poignée de poussières dans le coeur de la Reine mère.
Varanasi
Pour relier toutes ces villes aussi différentes qu’envoutantes, il y a les trains dans lesquels circulent les histoires et les vendeurs en ton genre et à toutes heures. Aux fils des rails et des minutes, on prend du plaisir à prendre du retard. Et si une vache se couche sur la voie, et si le train s’immobilise pour ne pas perturber sa quiétude, c’est encore des moments de gagnés à écouter parler ses gens au regard profond et aux récits fascinants.
Se promener en Inde, c’est flâner dans une carte postale, naviguer dans un tableau coloré, c’est un peu s’envoler et quitter la terre pour y redescendre subitement lorsque l’on croise le corps d’un enfant sans vie, que l’on contourne un lépreux allongé sur un bord de route sans trottoir ou que l’on fui du regard, un peu honteux, un mendiant qui tend sa main squelettique et tremblante en votre direction, quémandant quelques roupies dans son pot de fer cabossé pour ne pas finir six pieds sous terre.C’est rencontrer ces sourires aux yeux humides. C’est une douloureuse piqure qui vous rappelle que la vie n’est finalement qu’une loterie.
Se promener en Inde, c’est être dans l’oeil du Cyclone. Seul, perdu dans la masse qui tourbillonne, qui souffle dans vos tympans une symphonie de klaxons. Seul, flottant dans un champ d’astéroïdes aux moteurs vrombissants, entre les étoiles de salives filantes qui se désagrègent à vos pieds et les météorites humaines qui foncent droit devant. Ou encore seul, entre ses mains tentaculaires qui tente de vous magnétiser vers l’échoppe bringuebalante du copain.
Se promener en Inde, c’est être cette fourmi au coeur de la fourmilière grouillante, oppressante et bruyante.
C’est être enivré sans avoir bu d’alcool, transporté dans une autre galaxie par une fée qui a troqué sa jupe verte contre un sari ocre…
C’est être un extra-terrestre sur une autre planète…
C’est être un grain de sable dans un tumultueux désert…
C’est être un frêle esquif dans la fureur de l’océan…
C’est n’être rien du tout finalement…
Découvrez le blog de Nicolas: L’ornithorynque voyageur
wow, un vrai beau parcours, quelle ville as-tu préféré? moi je suis vraiment tombée amoureuse de la ville bleue, elle est magnifique, mais bon pour moi aussi l’Inde reste gravée profondément dans mon esprit.
Julie
Bonjour Julie,
Nicolas est actuellement au Sénégal où il fait de l’humanitaire aussi il ne pourra vous répondre tout de suite.
Vous pouvez lire ses autres carnets de voyage dans notre section envi2voyager.
Bonne journée
Très bien, merci de cette précision, je vais lire cela attentivement! :)
Pingback: Carnet de voyage de Nicolas: la Thaïlande | envi2bio
Pingback: Pénélope Bagieu nous raconte ses voyages en BD | envi2bio